Le 20 juin, nous débarquons à Carthagène après 19 heures dans le ciel. On récupère nos vélos et nos bagages... une partie seulement, les sacoches de Gaëlle ne nous ont pas suivi. On remonte nos vélos et on sort dans la ville sombre et chaude, il fait déjà nuit. Directement, on nous accoste pour nous aider à trouver le logement que nous avions réservé. On tourne un peu dans le dédale des ruelles, les adresses ne se lisent pas comme chez nous. L'hostel est en fait dans un des nombreux quartiers barricadés avec garde à l'entrée. On s'écroule de fatigue.


Nous voilà sur la côte caraïbe, il fait chaud, très chaud! On roule sous un cagnard permanent dès 10 heures du matin sur des routes goudronnées avec des super pistes cyclables, peu de dénivelé et peu de circulation. Cela nous mène à Santa Marta où nous découvrons les plages colombiennes.


On décide ensuite d'aller se rafraîchir dans les montagnes de Minca où un Belge a créé avec l'aide de locaux un lieu qui se veut d'être autonome. On y reste 5 jours avec une bande d'autres voyageurs et on les initie dès le premier soir à notre jeu de cartes favoris: Gabo! L'atmosphère paisible nous séduit: arbres fruitiers tropicaux, déclinaisons de verts, fleurs et oiseaux colorés, collines à perte de vue! On y mange végétarien ( ça change) autour de grandes tables conviviales et multinationales.


Nous nous mettons en route vers le sud en suivant une alternative à la panaméricaine. Elle est bordée d'un côté par des bananeraies et des palmeraies et de l'autre par des montagnes. On dort dans des hôtels de camionneurs et on mange les plats du jour des buibuis le long de la route composés systématiquement d'une soupe, de riz, de frites, d'une cuillère de salade et de viande, pas très folichon! Par contre, à chaque coin de rue se vendent de délicieux jus de fruits bien d'ici (guanabana, lulo, maracuja, mangue, mûres, tomate de arbol, ...). Nous roulons jusqu'à Fundacion et de là, nous prenons un bus pour Medellin.


C'est une ville assez agréable, différents quartiers aux différentes ambiances et beaucoup de parcs verdoyants. On flâne dans les rues jour après jour. Le free tour nous en apprend plus sur l'histoire de la ville et sur le récent conflit en Colombie (guérillas, paramilitaires, trafic de drogues). Il y a quelques années, certains quartiers figuraient parmi les plus dangereux du monde. La présence de touristes dans la ville enchante beaucoup de Colombiens car cela signifie que la situation a changé et ils sont fiers de pouvoir partager la beauté de leur pays. Nous séjournons une semaine dans le centre ville, très animé la journée mais où la réalité des grandes villes nous frappe chaque jour: la mendicité, la prostitution et les junkies sont partout.


Les premiers jours de vélo après ce séjour en ville sont fastidieux! Pour éviter la panaméricaine et rejoindre des petits villages typiques, nous prenons des routes en graviers, terre, pierre qui zigzaguent à travers les collines où la végétation luxuriante nous émerveille. Les pentes sont raides, nous dérapons souvent et plus d'une fois nous avons dû mettre pieds à terre pour pousser les vélos. Dans les petits villages que nous croisons, il y a toujours une baraque où la musique va à fond, un lieu avec minimum une table de billard (on se demande comment ils l'ont amenée), des chiens et des poules qui traînent dans la rue et des pouces levés et des sourires à notre passage. Dès qu'on s'arrête, les Colombiens nous accostent et nous posent toujours les mêmes questions: d'où on vient, où on va, à vélo?!


De retour sur la panaméricaine, on n'a jamais été aussi heureux de retrouver le macadam. Les montées sont faisables et on dépasse à nouveau les 25 km par jour. C'est à ce moment que nous croisons pour la première fois des voyageurs à vélo. Un couple de Français, Vianet et Capucine, qui remonte d'Argentine. Ils sont enchantés de leur voyage et partagent avec nous leur énergie positive. Nous sommes encore plus convaincus que le vélo est un moyen de transport extraordinaire pour voyager!

Sur leur bon conseil, nous prenons la direction de Salento. En chemin, nous rencontrons deux Américaines, Nikki et Laura, avec qui nous roulons le reste de la journée. Avec elles, nous faisons une excursion à pieds dans la vallée de Cocora, une réserve naturelle où poussent des palmiers géants. Nous faisons également le crochet par «la ferme des colibris». C'est très impressionnant de les observer de près mais il faut pour ça être patient.

Après Salento, c'est super, ça descend ou c'est plat. Nous roulons dans la vallée où les routes sont bordées de champs de cannes à sucre.


Dans les montagnes sur la route vers Popayan, nous rencontrons Eric, un Vénézuélien qui va à vélo jusqu'en Uruguay. On fait un bout de chemin avec lui et il nous explique brièvement la situation de son pays. En effet, au plus on se rapproche de la frontière équatorienne, au plus on croise de Vénézuéliens le long des routes et embarqués sur les camions. Ils fuient leur pays où, entre autre, la monnaie n’a plus aucune valeur et où il est difficile de trouver de la nourriture ainsi que de nombreux produits utiles au quotidien, comme du savon par exemple! On se rend compte que la situation des migrants est semblable partout dans le monde: beaucoup de Colombiens nous mettent en garde contre eux en nous disant que ce sont des voleurs, des violeurs, des malfrats. Des préjugés totalement infondés et véhiculés par les médias raffolant des faits divers qui malheureusement sont diffusés partout à longueur de journée. Toutes ces personnes croisées sur notre route, à l’instar des Colombiens, nous ont souri, salués, et encouragés. A Popayan, on a perdu Éric en cours de route et on se pose quelques jours. Ça nous donne l’occasion de nous balader dans la « ville blanche » et d’en appendre davantage grâce au « free tour ». Les bâtiments de la vieille ville ont tous été peints à la chaux pour éviter la propagation d’une maladie: des insectes qui pondent sous la peau des mains et des pieds.


C’est après Popayan, dans le village de El Bordo, que nous sommes accueillis dans notre première « casa del ciclista ». Il s’agit d’une sorte de réseau d’hôtes qui accueillent les cyclovoyageurs en Amérique latine. Plusieurs voyageurs y logent déjà: des Vénézuéliens, un Espagnol et... notre ami Éric que l’on retrouve avec joie! On s’y met tous pour cuisiner un bon repas. C’est délicieux et bonne ambiance.

Dès le lendemain, c’est reparti, à quatre cette fois, avec Éric et Santi l’Andalou. La journée est intense avec les montées et le vent de face, on arrive à un village à la tombée de la nuit. Jusqu’à ce moment, nous dormions chaque nuit dans des hôtels et ne cuisinions que très rarement. Nous avons ensuite suivi l’exemple de Santi et Éric: demander aux gens un endroit pour camper et se faire de bonnes bouffes nous mêmes. Cela nous permet de rencontrer chaque soir des villageois avec qui le déballage de nos affaires et de la tente ont beaucoup de succès.


Pour arriver à Pasto, ce sont trois jours de montées non stop! Là encore nous sommes accueillis (à 3 car on a encore perdu Éric) chez Dorys, de la communauté « warmshower ». On s’est bien fait plaisir à cuisiner et à manger : paella, vin chilien et moelleux au chocolat! Nous avons eu une discussion très intéressante avec nos hôtes. Elles nous ont exposé leur point de vue sur la situation actuelle du Venezuela ainsi que sur l’histoire récente de la guerre en Colombie. Il nous reste peu de kilomètres avant la frontière avec l’Equateur mais beaucoup de dénivelés et il fait bien froid.


Dernier arrêt en Colombie: Ipiales, où nous accueillent Andreas et son frère, tout deux déguisés en clowns! Ils animent des fêtes d’anniversaire pour petits et grands. En plus de cela, Andreas est animateur radio pour enfants. Avant de partir nous enregistrons un message en disant quelques mots sur notre voyage qu’il diffusera à la radio. Nous tenterons de lui envoyer un message pour chaque pays que nous traverserons.

Au matin, nous partons sous la bruine vers la frontière. Nous y prenons un énième café soluble et des empanadas avec les pesos colombiens qu’il nous reste en poche. Une belle façon de quitter le pays!